Moly-Sabata
Une exposition avec des œuvres d’Amandine Arcelli, Katinka Bock, Stéphanie Cherpin, Marc Desgrandchamps, Tarik Kiswanson, Eva Nielsen et Émilie Perotto selon un commissariat de Joël Riff
LES ÉPIS GIRARDON
Depuis le balcon de Moly-Sabata lorsqu’on regarde aujourd’hui le fleuve, un mystérieux tracé reste perceptible dans l’eau. Par quelques lignes plus sombres qui s’ajoutent au graphisme des courants, la mémoire du Rhône s’offre au regard attentif. Il faut interroger le patrimoine sablonnais pour identifier ces présences érodées, discrètes ruines d’innovations primordiales.
Henri Girardon est ingénieur en chef de la navigation. Dès 1884, il s’emploie à parfaire des aménagements déjà opérationnels sur d’autres cours européens, consistant à concentrer les flux en un seul chenal pour jouir ainsi d’une ampleur et d’une vitesse optimale. Ces installations s’inscrivent dans le désir séculaire de dompter le fleuve. Il s’agit de le contraindre sans le forcer. Qu’ils soient noyés ou plongeants, les épis participent en tant que contreforts des digues, à cet effort d’ingéniosité.
Le débit et ses préoccupations dépassent le champs de l’hydrologie. Les circulations autant physiques que dématérialisées sont des enjeux contemporains qu’il importe de maîtriser. La déambulation d’un corps et avec lui, la promenade d’un regard, suivent un mouvement canalisé par des ouvrages d’art conçus à leur attention.
La prochaine exposition à Moly-Sabata cherche à navigabiliser l’espace, pour une excursion ponctuée d’œuvres qui en modifient la trajectoire. La résonance des peintures d’Eva Nielsen et Marc Desgrandchamps forme un environnement aqueux dans lequel s’érigent les sculptures de Amandine Arcelli, Katinka Bock, Stéphanie Cherpin, Tarik Kiswanson et Émilie Perotto. L’expérience sensible de cet accrochage multiplie les écrans pour mieux tamiser à chaque passage, et continuer sans fin à découper l’élément liquide.